Compte rendu de la conférence du Professeur Krolak-Salmon sur le Thème ‘J’ai la mémoire qui flanche’ dans le cadre de la Semaine Bleue 2016.

Conférence du Professeur Krolak-Salmon sur le Thème ‘J’ai la mémoire qui  flanche’ dans le cadre de la Semaine Bleue 2016.

Rédaction : Nicole Sarda, Directeur de Recherches ScienSAs-NeuroPsy -INSERM. 

Qu’entendons par plainte mnésique ? Derrière cette expression qui semble compliquée se cache une crainte toute simple. Celle de perdre la tête ! Ce phénomène s’accentue après 50 ans. En effet, les seniors sont plus fréquemment sujets à la plainte mnésique. Au fil de l’âge, il est tout à fait normal que la mémoire soit moins aiguisée : le corps vieillit, tout simplement. Il y a toutefois lieu de s’alarmer lorsque les plaintes mnésiques se transforment en véritables jérémiades et virent à l’obsession. Dans ce cas, il peut s’agir du premier symptôme de la maladie d’Alzheimer ou d’un autre trouble apparenté. Il faut d’autant plus s’inquiéter lorsque le patient montre des signes de dépression et d’anxiété. A ce jour, les statistiques indiquent que 500 000 à 800 000 personnes sont  touchées par la maladie d’Alzheimer, seul 20 à 30 % étant diagnostiqués. Or une plainte suspecte appelle à un diagnostic par un spécialiste !

Il existe 2 sortes de mémoire : -la connaissance ancienne (‘je connais Rome par exemple ‘) résistante au temps /au vieillissement ; -le souvenir (je me souviens de ce film au titre ???) plus fragile car le cerveau trie parmi les innombrables informations qui lui arrivent selon leur importance (ex. 11 Septembre 2001 ? (Attentats !) ou 2 Août 2014 ?) et retient les plus importantes.

Il existe une réserve de mémoire ou mémoire cognitive qui dépend de chacun d’entre nous selon les critères suivants : les gènes ; les événements liés à l’éducation (capacités intellectuelles) ; l’exposition à l’environnement familial plus au moins stimulant; les interactions sociales comprenant les études, les loisirs, notre métier …. Des études épidémiologiques montrent une augmentation du nombre de neurones fonction des capacités intellectuelles.

La mémoire comme ou plus que toute fonction physiologique nécessite des bonnes pratiques,  une hygiène de vie. 1- Activité physique régulière de 20-30 min/jour, bonne pour les cartilages, les muscles, la mémoire. Des méthodes alternatives telles que sophrologie, méditation peuvent être complémentaires ; 2-une alimentation équilibrée variée contient toutes les vitamines à l’exception de la vitamine D et enfin, le plaisir de manger. On privilégie les bonnes huiles, le régime crétois : poissons, huile d’olive… fruits,  peu de gras, de sel, de sucre de viande rouge…  Les ennemis de la mémoire sont : 1-l’anxiété pathologique et le stress ; la rumination, la dépression ; 2-le manque de sommeil très important tout en sachant que sa quantité diminue avec l’âge donc 5-6 h versus 7-8h suffissent ; 3-les facteurs de risque cardiovasculaire : tabac, diabète, cholestérol, hypertension artérielle.

Les plaintes de mémoire normales sont non prédictives de la maladie d’Alzheimer « je n’imprime pas !». En revanche, l’oubli des événements importants : petits enfants, dernier voyage, repérages des lieux, les plaintes avec une évolutivité nécessitent des tests de mémoire dans un centre spécialisé, qui vont aboutir à un faisceau d’arguments qui orienteront le spécialiste à approfondir le diagnostic et lui permettre une stratégie plus élaborée fonction des plaintes : scores des tests, IRM…

Comment fonctionne la mémoire ? Il faut retenir qu’au niveau cérébral, l’information reçue par le sujet suit des étapes essentielles: -l’encodage du stimulus forme la base nmésique ; il nécessite attention, concentration et stratégie émotionnelle. Cette première étape encode les informations de la mémoire; -le stockage se réfère au processus pouvant conduire à une altération de l'information localisée dans la mémoire à long terme, le stockage étant lié au processus de consolidation. Cette deuxième étape qui fait appel à la consolidation reprendrait les événements mis en place par l'encodage afin de les garder en mémoire c'est-à-dire sur une très longue période de la vie d'un individu (mémoire à long terme). Il nécessite répétition et sommeil de bonne qualité ; -la récupération de l’information se réfère au processus qui permet à une information d'être extraite de la mémoire à long terme. Cette troisième étape permet en théorie de se souvenir d'événements qui étaient en attente dans le cerveau.

Traitements ? Les patients sont informés sur les bonnes pratiques éthiques lors du diagnostic et des nouveaux traitements. Les traitements disponibles sont symptomatiques et non curatifs. A l’heure actuelle, on recherche l’apparition des premiers ‘marqueurs  moléculaires ‘ et les ‘régions cibles’ de la pathologie par des techniques de neuroimagerie dont le PET-Scan. Il n’y a cependant pas de dépistage systématique. Un essai thérapeutique pour prévenir l’évolution  de la maladie d’Alzheimer à un stade précoce de la maladie (c'est-à-dire n’ayant pas encore développé de symptômes) est en cours. Il s’agit d’un traitement par anticorps spécifiques visant des protéines impliquées dans les plaques amyloïdes (soit protéine amyloide, protéine Tau ou béta-sécrétase) afin d’inhiber leur formation, leur agrégation, leur dispersion au sein des structures cérébrales. A savoir qu’un protocole expérimental fera appel à des volontaires, appel lancé par le Centre Mémoire de l’Hôpital des Charpennes.